Le siège de la selle, voilà un sujet qui m’a fait cogiter et réfléchir depuis des années.
En 1993, du haut de mes 16 ans, pour ma première grande randonnée (10 jours en autonomie et plus de 330 kms), il manquait une selle et je fonçais donc à Paris chez un spécialiste de la rando acheter la selle manquante : selle d’arme premier prix, Made In Pakistan. Erreur de jeunesse, mais qui créé une première « expérience ».
Il aura fallu 30 ans pour que je comprenne mieux les tenants et aboutissants.
Sur cette selle d’arme, adieu les tabous, mes parties intimes se trouvaient fortement en contact du pommeau. Face à cette sensation fort désagréable, je basculais donc mon bassin en rétro version, lombaires et rein arrondis pour fuir cette pression. Sur mon premier cheval, j’ai voyagé ainsi. Sur mon deuxième cheval des années plus tard, cheval qui avait un « pas » qui déménage, ce sont mes fesses qui ont frotté sur le troussequin jusqu’au sang… J’ai randonné en selle australienne, avec des pastilles à vif sur les fesse, en selle Mac Lellan, sans bobo mais au secours l’assise à même le bois, et en siège type western : disparition des bobos, mais pas mieux d’un point de vue ergonomique… j’étais écartelée.
De là est née cette question : Pourquoi est-on bien dans un siège ? Pourquoi se blesse-t-on dans d’autres ? Où trouver la bonne position et la moindre contrainte de nos articulations ?
J’ai continué à randonner avec une approche empirique en testant plein de selles, mais sans vraiment savoir au fond répondre à cette question. De plus, je constatais que les avis différaient sur une même selle ; là où un cavalier était conquis, un autre restait sceptique.
Mélange de vécu, d’observations et d’une formation en ergonomie de la selle chez Eugénie Cottereau « Ergonomie Equestre », j’ai enfin avancé sur ce sujet.
Voici donc la synthèse de mes connaissances et réflexions à date.
LE BASSIN DU CAVALIER
Pour comprendre pourquoi le siège d’une selle nous correspond plus ou moins bien, il faut se pencher sur notre anatomie, et en tout premier lieu sur notre bassin.
Le bassin va influer sur notre ressenti en selle par quatre aspects :
- La hauteur de la symphyse pubienne,
- L’écartement de nos ischions,
- La profondeur de notre bassin (distance entre symphyse à l’avant / ischions / coccyx à l’arrière),
- La longueur et orientation de notre coccyx.
Si ces quatre paramètres influent sur notre sensation de confort en selle, ils sont en plus propres à chaque individu.
D’une part, il existe des différences spécifiques sur les bassins homme – femme (cf. schéma ci-dessous), mais de plus il y a des différences notoires de forme et taille de bassin au sein même de chaque sexe.
Lors de ma formation en ergonomie, nous avons réalisé des mesures sur l’écartement de nos ischions et la distance avec notre symphyse pubienne ; nous nous sommes vite rendues compte que nos mesures variaient significativement de l’une à l’autre. Et de fait, nous avons ensuite essayé plein de selles, et constaté que chacune avait sa propre préférence pour tel ou tel siège. D’où le fait que le siège de selle « universel » n’existe pas.
RÉFLEXION POUR UNE BONNE ADÉQUATION DU SIÈGE DE LA SELLE
Revenons maintenant à la selle. Notre siège se décompose en quatre parties : pommeau, enfourchure, plat du siège et troussequin.
Pour simplifier, on pourrait mettre en lien ces sous-parties du siège en regard de notre bassin.
- La hauteur et la pente du pommeau :
Elles doivent être cohérentes avec la hauteur de notre symphyse pubienne. Si cette dernière vient au contact du pommeau, aïe aïe aïe !!! Nos parties intimes en souffrent.
- La largeur de l’enfourchure :
Elle va être liée à notre largeur de bassin mais aussi à l’importance et l’orientation de nos muscles adducteurs.
Si l’enfourchure est trop étroite, nous aurons un sentiment d’instabilité et de bascule vers l’avant. Si l’enfourchure est trop large, il devient impossible que la cuisse vienne se poser sur son plat. En conséquence, nos genoux pivotent en rotation extérieure, nos pointes de pieds s’écartent, nos adducteurs tiraillent. Hanches, genoux et chevilles sont alors malmenés jusqu’à en devenir douloureux au fil des heures passées en selle.
- Le plat du siège :
Le siège de selle, suivant les marques, les modèles et les choix de conceptions, est plus ou moins long, plat ou creux, large ou étroit. Il doit autoriser le bassin à se poser, en longueur et en largeur.
Ensuite, tout dépend également de la discipline équestre pratiquée et de la sensation recherchée par le cavalier. Certains ont besoin de sentir calés et sécurisés, quand d’autres préfèrent conserver plus de liberté. Un siège qui vous correspond, c’est donc la prise en compte des éléments évoqués ici.
De même que la pente du pommeau doit être cohérente avec la hauteur de notre symphyse pubienne, le troussequin doit être cohérent avec nos fesses et notre coccyx. Là encore, il peut y avoir trop de contact, frictions et brulures, ou pas assez de soutien. Encore un juste milieu à trouver, spécifique à chacun.
Ajoutez à cela qu’il faut respecter votre cambrure naturelle, que la selle soit par ailleurs adaptée au cheval, que le siège soit correctement équilibré, et que la position des étriers vous autorise à trouver un bon équilibre. Pour cela, il faut consulter un sadde-fitter.
Le sujet est multifactoriel et donc au global d’une grande complexité.
CONCLUSION SUR LE SIÈGE DE LA SELLE
Si je ne connais pas à ce jour de « mesures précises » des bassins qui puissent être réalisées, je pense que c’est plutôt par l’essai de différentes selles et différents sièges que chacun trouvera son bonheur. Et gardez en tête que si un siège ne vous convient pas, vous ne vous y habituerez pas… Point final.
Autant que possible, je fabrique mes selles en prenant en compte ces critères. Mais cela ne fait pas tout. Pour certains, ce sera le paradis, pour d’autres, il faudra chercher son bonheur … ailleurs !
Belles randonnées à toutes et tous.